L’emploi d’un jeune de 15 à moins de 18 ans n’est pas anodin. Le droit du travail encadre strictement les activités qu’on peut leur confier, avec une frontière claire entre les travaux totalement interdits et ceux autorisés sous conditions, appelés travaux « réglementés ». Ignorer ces règles, c’est s’exposer à des sanctions financières, voire à une suspension du contrat.
(Attention à ne pas confondre TRAVAIL et STAGE –> Obligations de l’employeur concernant les stages en entreprise)
Travaux strictement interdits pour les jeunes de 15 à moins de 18 ans
Certains travaux sont totalement proscrits, quel que soit le contexte ou l’objectif pédagogique. C’est le cas notamment de :
- Toute activité pouvant nuire à l’intégrité physique ou morale, comme l’exposition à des scènes pornographiques ou violentes.
- L’exposition à des agents chimiques dangereux, notamment les poussières d’amiante à des niveaux d’empoussièrement supérieurs à 100 fibres par litre d’air.
- Les environnements à risques biologiques : laboratoires, hôpitaux, ou chaînes agroalimentaires susceptibles de contenir virus, bactéries ou parasites.
- Les travaux exposant à des vibrations mécaniques importantes (marteaux-piqueurs, engins de chantier).
- Les champs électromagnétiques dépassant les seuils de sécurité réglementaires.
- Tout travail en présence de pièces sous tension électrique, sauf très basse tension.
- Les activités de démolition ou de tranchées exposant à des risques d’effondrement ou d’ensevelissement.
- La conduite de véhicules motorisés non équipés de dispositifs de sécurité en cas de renversement.
- Les travaux en hauteur dans les arbres ou exposant à des températures extrêmes.
- Les contacts avec des animaux dangereux, l’abattage ou l’équarrissage.
- Les activités au sein d’un bar ou d’un débit de boissons, sauf exception familiale ou cadre strictement défini pour les jeunes de plus de 16 ans en formation.
Aucune dérogation n’est possible pour ces activités. En cas de non-respect, l’inspection du travail peut ordonner le retrait immédiat du jeune salarié. Le contrat est alors suspendu, le salaire maintenu, mais l’employeur ne peut pas licencier le jeune.
Quelles sanctions pour les infractions aux travaux interdits ?
Un employeur fautif s’expose à une amende de 1 500 € (3 000 € en cas de récidive) s’il s’agit d’une personne physique. Pour une personne morale, l’amende grimpe à 7 500 € (15 000 € en récidive).
Travaux réglementés : sous conditions, certains travaux sont autorisés
Il existe une catégorie de travaux interdits qui peuvent néanmoins être confiés à un jeune, sous réserve de conditions strictes. On parle alors de travaux réglementés. Deux profils de jeunes peuvent y être affectés :
- Ceux en formation professionnelle (apprentissage, professionnalisation, Esat), après déclaration à l’inspection du travail.
- Ceux disposant de qualifications ou habilitations particulières, sans déclaration préalable.
Voici les domaines concernés par ces dérogations :
- Manipulation de produits chimiques dangereux (empoussièrement amiante niveau 1 uniquement).
- Exposition à des rayonnements ionisants (catégorie B, dès 16 ans), ou optiques artificiels.
- Travaux en milieu hyperbare (au-delà de 1,2 bar).
- Conduite d’engins automoteurs ou de levage.
- Utilisation de machines dangereuses (scies, presses, raboteuses) non sécurisables.
- Maintenance avec risque de redémarrage imprévu.
- Travaux en hauteur avec port d’EPI, montage ou démontage d’échafaudages.
- Opérations sur des appareils sous pression (compresseurs, chaudières).
- Travaux en milieux confinés (cuves, puits, égouts).
- Présence dans des ateliers de coulée de verre ou métal en fusion.
Conditions à respecter pour qu’un jeune puisse effectuer des travaux réglementés
L’employeur doit impérativement :
- Réaliser une évaluation des risques.
- Mettre en place des actions de prévention et des méthodes adaptées.
- Informer et former le jeune aux risques professionnels.
- Désigner un tuteur compétent.
- Obtenir un avis médical d’aptitude.
Une déclaration à l’inspection du travail est obligatoire, sauf si le jeune dispose déjà d’une habilitation, d’un diplôme ou d’un titre professionnel spécifique. Cette déclaration, valable 3 ans, peut être envoyée par lettre RAR ou courriel.
Elle doit comporter :
- Le secteur d’activité de l’entreprise.
- Les formations proposées.
- Les lieux d’accueil en entreprise.
- Les travaux concernés, les machines utilisées, les équipements manipulés.
Un modèle officiel de déclaration est disponible, ainsi qu’une notice explicative pour le compléter correctement.
Contrôle et pouvoir de l’inspection du travail
L’administration peut à tout moment retirer un jeune de son poste si elle estime que les conditions ne sont pas remplies ou si un danger grave et imminent existe. L’employeur a alors 2 jours ouvrés pour faire valider la levée du retrait après avoir corrigé les manquements. Voir Obligations de l’employeur en matière de santé et sécurité au travail
Sanction en cas de manquement à la réglementation sur les travaux réglementés
Même barème qu’en cas de travaux interdits : jusqu’à 1 500 € pour une personne physique (3 000 € en récidive), et jusqu’à 7 500 € pour une entreprise (15 000 € en récidive).
Ce que les employeurs doivent absolument retenir
Faire travailler un mineur, ce n’est pas simplement signer un contrat. C’est respecter des obligations précises, formalisées, vérifiables, et potentiellement lourdes en conséquences. La rigueur administrative est ici la seule parade aux sanctions. Et contrairement aux idées reçues, la simple qualité de stagiaire ou d’apprenti ne suffit pas pour justifier l’affectation à des postes dangereux.
Les entreprises doivent donc prendre au sérieux la réglementation applicable aux jeunes. La légèreté administrative dans ce domaine, comme souvent, se paie cash.