Depuis la réforme de 2019, les plans d’épargne retraite (PER) ont remplacé la mosaïque d’anciens dispositifs (PERCO, Madelin, Article 83…). Sur le papier, cette simplification devait clarifier les choix des entreprises. En réalité, elle a surtout déplacé la complexité. Entre le PEROB (plan d’épargne retraite d’entreprise obligatoire) et le PERECOL (plan d’épargne retraite d’entreprise collectif), les différences de régime, de financement et de fiscalité continuent de désorienter les dirigeants.
Ces deux plans partagent le même objectif : encourager l’épargne longue en vue de la retraite, avec un avantage fiscal à l’entrée. Mais leur philosophie diverge profondément. Le PERECOL relève de la logique d’épargne volontaire et collective. Le PEROB, lui, s’impose aux salariés visés par l’accord, avec des versements obligatoires. Et derrière cette distinction se cachent des effets concrets sur le coût, la flexibilité et la charge administrative pour l’entreprise.
Un cadre juridique commun mais des logiques opposées
Tous deux s’inscrivent dans la réforme issue de la loi Pacte du 22 mai 2019, codifiée aux articles L.224-1 et suivants du Code monétaire et financier.
Le PEROB et le PERECOL font partie de la même famille de produits : les plans d’épargne retraite d’entreprise (PERE). Ils sont gérés par des établissements financiers agréés (assureurs, mutuelles, institutions de prévoyance ou sociétés de gestion).
Mais leur logique diffère :
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le PERECOL est un dispositif collectif et facultatif, accessible à tous les salariés, sans obligation de versement ;
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le PEROB, au contraire, repose sur des versements obligatoires pour certaines catégories de salariés définies par l’accord ou la décision de l’employeur.
Derrière ces deux sigles se jouent deux conceptions de l’épargne retraite : la participation volontaire à une épargne d’entreprise, ou la constitution imposée d’un capital retraite complémentaire.
Le plan d’épargne retraite collectif (PERECOL) : la logique de la liberté encadrée
Un dispositif ouvert à tous les salariés
Le PERECOL succède au PERCO, en offrant davantage de souplesse. Il peut être instauré par accord collectif, ratification des deux tiers du personnel ou décision unilatérale dans les entreprises de moins de 50 salariés.
Tous les salariés doivent pouvoir y adhérer, éventuellement sous réserve d’une ancienneté maximale de trois mois. Les chefs d’entreprise, conjoints collaborateurs ou associés peuvent également y participer lorsque l’effectif est inférieur à 250 salariés.
Des versements multiples et flexibles
Les versements sur le PERECOL peuvent provenir de différentes sources :
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versements volontaires des salariés ;
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affectation de l’intéressement, de la participation ou de la PPV ;
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versements complémentaires de l’employeur, sous forme d’abondement ;
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et, dans certains cas, transferts d’autres PER ou plans d’épargne existants.
L’abondement de l’employeur reste plafonné à 16 % du plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), soit environ 7 536 € en 2025.
Les droits acquis sont portables : le salarié qui quitte l’entreprise peut conserver ou transférer son plan vers un autre PER. C’est un avantage majeur du dispositif collectif par rapport aux anciens systèmes cloisonnés.
Une sortie à la retraite assouplie
Au moment du départ à la retraite, le salarié peut choisir entre :
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la sortie en capital, en une ou plusieurs fois ;
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la sortie en rente viagère ;
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ou une combinaison des deux.
Cette liberté fait du PERECOL un outil d’épargne retraite souple, souvent préféré par les salariés qui souhaitent garder la maîtrise de leurs placements.
Le plan d’épargne retraite obligatoire (PEROB) : un cadre rigide mais puissant
Des bénéficiaires ciblés
Le PEROB s’adresse à une ou plusieurs catégories objectives de personnel : cadres, non-cadres, membres d’une direction, etc. La catégorisation doit reposer sur des critères objectifs au sens de l’article R.242-1-1 du Code de la sécurité sociale, pour éviter toute discrimination.
Le plan peut être instauré :
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par accord collectif ou accord de branche,
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ou par décision unilatérale de l’employeur.
Une fois mis en place, il s’impose aux salariés concernés. L’adhésion est obligatoire : impossible pour un salarié d’y renoncer, sauf départ de l’entreprise.
Des versements obligatoires
Le PEROB repose sur un double financement :
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des cotisations employeur obligatoires, calculées selon un taux ou un montant fixé par l’accord ou la DUE ;
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et, éventuellement, des cotisations salariales obligatoires.
Ces cotisations peuvent être assises sur le salaire brut ou fixées en montant forfaitaire. Elles s’ajoutent au coût global de la rémunération, mais bénéficient d’un traitement social et fiscal de faveur.
L’entreprise peut également y ajouter un abondement facultatif sur les versements volontaires des salariés, dans la limite des plafonds légaux.
Un plan conçu pour la retraite, pas pour la mobilité
Les sommes versées sur un PEROB sont bloquées jusqu’à la retraite, sauf cas exceptionnels de déblocage anticipé (invalidité, décès du conjoint, surendettement, fin de droits au chômage, acquisition de la résidence principale).
La sortie s’effectue principalement en rente viagère, même si certains contrats prévoient désormais une option de sortie en capital partiel.
Ce caractère obligatoire et peu liquide en fait un outil davantage tourné vers la prévoyance que vers la motivation salariale.
Régime fiscal et social : un avantage réel mais encadré
Pour l’entreprise
Les versements de l’employeur sur un PEROB ou un PERECOL sont déductibles du bénéfice imposable, comme des charges sociales.
Ils sont exonérés de cotisations sociales, à l’exception de la CSG/CRDS et de la taxe sur les salaires le cas échéant.
Le forfait social s’applique uniquement pour les entreprises de plus de 250 salariés. Les PME bénéficient donc d’une exonération totale sur les contributions patronales.
Dans le cas du PERECOL, l’abondement est également exonéré d’impôt sur le revenu pour le salarié, dans la limite du plafond de 16 % du PASS.
Pour les salariés
Les versements volontaires sur le PERECOL ou le PEROB sont déductibles du revenu imposable, dans la limite de 10 % des revenus professionnels nets (ou 10 % du PASS si plus favorable).
Les abondements de l’employeur sont exonérés d’impôt sur le revenu, dans la même limite.
Les rentes viagères issues du PER sont ensuite imposées au titre des pensions, tandis que les sorties en capital sont soumises à un prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30 %, incluant impôt et prélèvements sociaux.
Cette architecture fiscale, avantageuse à l’entrée mais imposée à la sortie, incite davantage à la capitalisation longue qu’à l’épargne de précaution.
Avantages comparés : souplesse contre sécurisation
| Critère | PERECOL (Collectif) | PEROB (Obligatoire) |
|---|---|---|
| Adhésion | Facultative | Obligatoire pour les catégories visées |
| Versements | Volontaires, participation, intéressement, abondement | Obligatoires (employeur et/ou salarié) |
| Bénéficiaires | Tous les salariés (condition d’ancienneté possible) | Catégories objectives définies |
| Sortie | Capital, rente ou mixte | Rente principalement |
| Portabilité | Oui, transfert possible | Oui, mais plus complexe |
| Fiscalité | Exonération à l’entrée et taxation à la sortie | Idem |
| Objectif principal | Épargne retraite souple et collective | Retraite complémentaire obligatoire |
| Intérêt pour l’entreprise | Motivation et fidélisation | Prévoyance et sécurisation des cadres |
| Souplesse de gestion | Élevée | Faible |