La récupération de la TVA sur les carburants est l’un des terrains les plus piégeux pour les entreprises. Essence, gazole, GPL, électricité : chaque type de carburant obéit à des règles différentes, et le traitement fiscal dépend aussi du type de véhicule utilisé (tourisme ou utilitaire). Cette complexité est entretenue par des évolutions législatives successives, notamment depuis 2017 où la TVA sur l’essence est devenue partiellement déductible. Résultat : les erreurs sont fréquentes, et les rejets de déduction quasi systématiques en cas de contrôle.
Ce que dit la loi
L’article 298 du Code général des impôts encadre la déductibilité de la TVA sur les carburants. Longtemps, une distorsion a existé entre l’essence (non déductible) et le gazole (déductible). Depuis 2017, un alignement progressif a été instauré pour éviter cette inégalité, avec un taux de récupération croissant pour l’essence. Depuis 2021, la TVA sur l’essence est récupérable à hauteur de 80 % pour les véhicules de tourisme et à 100 % pour les véhicules utilitaires, au même titre que le gazole.
Quels taux de récupération selon le type de carburant ?
La récupération de la TVA dépend à la fois du carburant et de la catégorie du véhicule :
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Essence sans plomb : 80 % pour les véhicules de tourisme, 100 % pour les utilitaires.
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Gazole : 100 % quel que soit le type de véhicule.
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GPL et électricité : 100 % quel que soit le véhicule utilisé.
Cette différence entre véhicules de tourisme et utilitaires reste fondamentale. Une même facture de carburant peut ouvrir droit à une récupération intégrale pour une camionnette, mais seulement partielle pour une voiture de tourisme.
Véhicules de tourisme ou utilitaires : une distinction cruciale
Le critère de distinction ne repose pas sur l’usage du véhicule mais sur sa conception. Peu importe qu’une voiture de tourisme soit exclusivement utilisée pour l’activité professionnelle : l’administration bloque la déduction au-delà de 80 % pour l’essence et n’autorise jamais plus de 100 % pour le gazole.
En revanche, un véhicule utilitaire – camionnette, fourgon, véhicule conçu pour transporter des marchandises – bénéficie d’une récupération totale, quelle que soit la nature du carburant.
Les pièges les plus fréquents
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Factures imprécises : une facture de carburant sans mention de TVA rend toute récupération impossible. Les tickets de station-service simplifiés, très répandus, sont souvent inutilisables.
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Confusion entre essence et gazole : certains services comptables appliquent encore par erreur un taux de récupération limité sur le gazole, alors qu’il est désormais intégralement déductible.
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Véhicules mixtes : certains modèles classés comme « mixtes » (transport de personnes et de marchandises) sont assimilés à des véhicules de tourisme par l’administration, ce qui limite la récupération de TVA.
Les risques en cas de mauvaise application
Les carburants représentent un volume de dépenses élevé et récurrent. L’administration fiscale y voit donc un gisement de redressements particulièrement rentable. Les entreprises qui appliquent systématiquement une récupération totale de la TVA, sans distinguer véhicule et carburant, s’exposent à un rejet massif.
De plus, en cas d’utilisation d’un véhicule de tourisme à des fins personnelles, l’URSSAF peut requalifier une partie des dépenses en avantage en nature, avec des cotisations sociales supplémentaires à la clé.
Bonnes pratiques pour sécuriser la récupération
Pour éviter les erreurs et optimiser la gestion fiscale des carburants, les entreprises doivent appliquer quelques principes simples mais stricts :
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exiger des factures complètes mentionnant le taux et le montant de la TVA ;
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distinguer clairement les dépenses selon le type de véhicule (tourisme ou utilitaire) ;
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appliquer le bon taux de récupération en fonction du carburant (80 %, 100 % ou refus de déduction) ;
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archiver de manière centralisée toutes les factures de carburant pour anticiper un contrôle ;
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former les collaborateurs et les services comptables pour éviter les confusions persistantes entre essence et gazole.
Une complexité volontairement entretenue ?
La récupération de la TVA sur les carburants illustre à quel point la fiscalité française peut transformer une opération banale en casse-tête administratif. Entre essence, gazole, GPL et électricité, les règles varient et se superposent, au détriment des entreprises. Pourtant, la rigueur documentaire et le respect scrupuleux des taux permettent de limiter les risques. Dans ce domaine, la conformité n’est pas une option : c’est une assurance contre les redressements fiscaux qui frappent, presque systématiquement, ceux qui ont négligé la subtilité des règles.