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Religion en entreprise : ce que peut exiger un employeur face aux revendications religieuses

La question de la religion dans l’entreprise française suscite, dans les faits, autant d’incompréhensions que de crispations. Si la liberté religieuse est bien garantie, elle n’est pas sans limites, surtout lorsque l’intérêt de l’entreprise ou le bon fonctionnement du service sont en jeu. De nombreuses idées reçues circulent, notamment chez les dirigeants, souvent démunis face à des demandes de salariés invoquant leur foi.

Voici un panorama clair et juridiquement fondé des règles applicables en droit du travail, avec un éclairage opérationnel sur les possibilités d’action pour l’employeur.

Liberté religieuse au travail : un droit sous conditions

Un salarié a le droit d’exprimer ses convictions religieuses, y compris par le port d’un signe ou d’un vêtement religieux, sur son lieu de travail. Ce principe découle de la liberté de conscience, protégée par la Constitution et par le Code du travail (article L1121-1). Mais attention : cette liberté n’est pas absolue.

L’employeur peut restreindre l’expression religieuse au sein de l’entreprise si, et seulement si, cette restriction est justifiée par la nature des tâches à accomplir et proportionnée au but recherché. C’est notamment le cas pour :

  • des raisons de sécurité (ex. : incompatibilité entre un couvre-chef religieux et un casque de chantier) ;
  • des exigences d’hygiène ou de santé (ex. : tenue non conforme dans l’agroalimentaire ou les laboratoires) ;
  • la nécessité d’assurer la neutralité dans les relations avec la clientèle.

Dans ces situations, l’interdiction doit être inscrite noir sur blanc dans le règlement intérieur (obligatoire dans les entreprises d’au moins 50 salariés) ou dans une note de service ayant valeur de règlement.

Signes religieux et contact avec la clientèle : la neutralité peut primer

Un employeur peut valablement imposer la neutralité aux salariés en contact avec le public. Cela signifie qu’un salarié chargé de l’accueil, de la vente ou du service peut être tenu de ne pas porter de signe religieux visible. Cette exigence ne peut toutefois pas être étendue aux postes sans contact externe, sauf justification objective.

Cette règle a été validée par la Cour de cassation, mais à condition d’être clairement prévue dans le règlement intérieur ou dans une note de service régulièrement portée à la connaissance des salariés.

Interdiction de la dissimulation du visage : pas de dérogation religieuse

Un salarié ne peut jamais dissimuler son visage sur son lieu de travail lorsqu’il est en contact avec le public ou s’il exerce dans une structure chargée d’une mission de service public (cliniques privées, caisses de sécurité sociale, etc.).

La loi du 11 octobre 2010 interdit toute tenue rendant impossible l’identification de la personne, comme la burqa, le niqab ou une cagoule. Cette interdiction est absolue, y compris pour des motifs religieux.

En cas de non-respect, le salarié risque une amende pouvant aller jusqu’à 150 euros. Cette interdiction ne s’applique pas dans les locaux uniquement accessibles aux salariés et non ouverts au public.

Absence pour fêtes religieuses : pas un droit automatique

Contrairement à ce que croient de nombreux salariés, il n’existe aucun droit à s’absenter pour une fête religieuse. Le Code du travail ne prévoit pas de congé spécifique pour ce motif.

Toute absence doit être expressément autorisée par l’employeur. Ce dernier est en droit de refuser, sans avoir à motiver sa décision. Le salarié n’est pas obligé d’indiquer que sa demande d’absence est d’ordre religieux, mais cela n’a aucun impact sur la liberté de l’employeur de refuser.

Certaines conventions collectives ou accords d’entreprise peuvent toutefois prévoir des absences autorisées pour motifs religieux (par exemple pour Yom Kippour ou l’Aïd). Un simulateur permet de vérifier la convention applicable en saisissant le SIRET de l’entreprise.

Refus de visite médicale pour motif religieux : impossible

La visite médicale obligatoire ne souffre aucune exception, y compris pour des raisons religieuses. Elle relève d’un impératif de santé publique et de protection des salariés.

Un salarié ne peut donc pas invoquer ses convictions pour refuser un examen médical auprès de la médecine du travail.

Aménagement d’horaires pour pratique religieuse : une simple faculté

Un salarié peut demander un aménagement d’horaires pour pratiquer son culte. L’employeur peut accepter, mais n’y est nullement contraint.

Il s’agit ici d’un pouvoir discrétionnaire de l’employeur, dans le cadre de son pouvoir de direction. Il peut refuser si l’organisation du travail ou les impératifs de production ne permettent pas de telles souplesses.

En revanche, rien n’interdit à un salarié de prier discrètement dans son bureau pendant une pause, à condition que cela ne nuise ni à la sécurité ni au bon fonctionnement du service.

Le prosélytisme religieux au travail est interdit

La liberté religieuse ne donne en aucun cas le droit à un salarié de chercher à convaincre ses collègues d’adhérer à sa religion. Toute forme de prosélytisme est interdite dans l’entreprise.

Il est également interdit d’imposer ses convictions à autrui ou de multiplier les signes ostentatoires dans une démarche revendicative. Ce comportement peut être sanctionné disciplinairement.

Refus d’exécuter certaines tâches pour raisons religieuses : non recevable

Un salarié ne peut pas refuser d’effectuer une tâche inhérente à son poste en raison de sa religion. La fiche de poste, le contrat de travail et l’organisation du travail s’imposent à tous.

Refuser, par exemple, de serrer la main d’un collègue de sexe opposé ou de vendre certains produits pour des raisons religieuses peut justifier une sanction, voire un licenciement.

Comment se protéger juridiquement ?

Pour éviter tout contentieux ou accusations de discrimination, il est impératif de :

  • formaliser les restrictions dans le règlement intérieur ;
  • documenter précisément les raisons justifiant ces restrictions (sécurité, santé, image, etc.) ;
  • traiter toutes les situations comparables de manière identique, quelles que soient les convictions des salariés concernés.

En l’absence de cadre écrit clair, les tribunaux pourront considérer que l’employeur a commis une discrimination indirecte, même involontaire.

Textes de référence à connaître

  • Code du travail : articles L1121-1 (libertés individuelles), L1132-1 à L1132-4 (non-discrimination), L1321-1 à L1321-6 (contenu du règlement intérieur) ;
  • loi n°2010-1192 du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l’espace public ;
  • circulaire du 2 mars 2011 précisant l’application de cette loi.

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