5 février 2025
La prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié. Elle permet à un salarié de quitter son poste en invoquant des manquements graves de son employeur. Encore faut-il que ces manquements soient reconnus comme suffisamment sérieux par le juge. Sinon, cette rupture sera requalifiée en simple démission, avec toutes les conséquences que cela implique : absence d’indemnités, perte de droits au chômage et parfois même une indemnité à verser à l’employeur.
Voici ce qu’il faut savoir sur la « prise d’acte », la procédure , les situations dans lesquelles elle peut être requalifiée en licenciement ou en démission, et ce qu’il advient lorsqu’elle intervient avec d’autres modes de rupture.
La loi ne prévoit aucun formalisme précis pour une prise d’acte. Elle peut même être verbale ou transmise par un avocat. Toutefois, en pratique, il est vivement recommandé de notifier une telle décision par écrit, notamment par lettre recommandée, pour en garder une trace. Ce courrier ne fixe pas les limites du litige : lors de l’audience, le salarié pourra évoquer d’autres faits, y compris antérieurs à la prise d’acte.
Autre point à connaître : cette rupture prend effet immédiatement. Le salarié n’a pas à effectuer de préavis, et il ne peut pas revenir sur sa décision une fois qu’elle a été notifiée.
La rupture ne produit ses effets (licenciement ou démission) qu’après l’intervention du conseil de prud’hommes. Depuis 2014, l’affaire est directement portée devant le bureau de jugement, qui doit statuer dans un délai d’un mois. C’est le juge qui décidera si la rupture est imputable à l’employeur ou non, et donc si elle ouvre droit à indemnisation.
Pour que la prise d’acte soit requalifiée en licenciement, 2 conditions doivent être réunies : les faits reprochés à l’employeur doivent être suffisamment graves et rendre impossible la poursuite du contrat. Il peut s’agir d’un non-paiement du salaire, de harcèlement, de mise en danger du salarié ou de violations répétées de ses droits fondamentaux.
Dans les cas les plus graves (discrimination, harcèlement, atteinte à une liberté fondamentale), la prise d’acte peut produire les effets d’un licenciement nul.
L’employeur devra alors verser :
Dans le cas d’un licenciement nul, l’indemnité est d’au minimum six mois de salaire, quelle que soit l’ancienneté du salarié. En revanche, aucune indemnité ne sera versée pour non-respect de la procédure.
Si le juge considère que les faits reprochés à l’employeur ne sont pas assez graves pour empêcher la poursuite du contrat, la prise d’acte sera requalifiée en démission. Cela signifie : pas d’indemnité de rupture, pas de droits au chômage, et potentiellement une indemnité à verser à l’employeur pour non-exécution du préavis.
Quelques exemples de situations non recevables :
Dans ces cas, la rupture sera considérée comme une démission classique.
Si le salarié prend acte de la rupture avant que l’employeur ne le licencie, c’est la prise d’acte qui sera prise en compte. Même si un licenciement est notifié après, il ne produira aucun effet juridique.
Inversement, si l’employeur notifie un licenciement avant que le salarié prenne acte, alors cette dernière est juridiquement sans effet. Le litige portera uniquement sur la validité du licenciement.
Un salarié peut décider de prendre acte de la rupture alors qu’une procédure de résiliation judiciaire est déjà en cours. Dans ce cas, seule la prise d’acte sera examinée, mais le juge pourra tenir compte des éléments invoqués dans les deux procédures pour motiver sa décision.
La prise d’acte peut être un levier puissant entre les mains du salarié, mais elle reste une démarche risquée. Mal encadrée, elle peut se retourner contre lui. Avant de rompre son contrat de cette manière, mieux vaut consulter un avocat spécialisé en droit du travail.